top of page

Là où naissent les ruines, 2023, 9 min.

Entretien avec Mo Gourmelon

 

Mo Gourmelon  : À l’occasion de l’élaboration de votre nouveau projet « Là ou naissent les ruines » (2023, ville de Toulouse, Cantor Dust Lab), vous m’avez déclaré souhaiter développer une série qui prolonge l’histoire et l’univers de « Cantor Dust Man » (2009 Le Fresnoy) et le suivant « Puzzle 3D » (2010 avec la Géode). Vous poursuiviez en disant que comme ces deux films vous aimeriez garder la forme expérimentale, hybride, la liberté que vous aviez pour ces projets guidés par des idées plastiques et conceptuelles.

Tout d’abord d’où vient ce nom Cantor Dust plutôt joli et poétique et que l’on sent « fabriqué ». Pouvez vous nous présenter cet ensemble que vous avez nommé « Iterative Memories of Cantor Dust Man » ? Comment « Là ou naissent les ruines » vient-il incarner une suite ?

 

Sébastien Loghman : Le titre de la série « Iterative Memories of Cantor Dust Man » vient de « Cantor dust » qui signifie, en anglais, « poussière de Cantor ». Cet ensemble mathématique a été « fabriqué », pour reprendre votre expression, par le scientifique du 19ème siècle, Georg Cantor. Il s’agit du premier exemple de fractale de l’histoire des mathématiques. Pour situer, les fractales étaient déjà dans la nature avant d’apparaître dans les maths. Par exemple, prenez le chou romanesco qui apparaît dans mon film Cantor Dust Man : si vous regardez un détail de ce légume, ce détail ressemble au chou dans sa globalité. Ainsi, on retrouve la même structure à différentes échelles. Et c’est vrai aussi pour les montagnes, les flocons de neige et les côtes de la Bretagne.

 

L’idée de « Cantor Dust Man » consistait à mettre en scène la pluralité d’un être. Le personnage Romanesco y raconte avoir vécu plusieurs vies, et chante qu’un souvenir contient un souvenir qui contient un souvenir, etc… Le film en relief Puzzle 3D en est une suite : le personnage Romanesco a vieilli et cherche dans un souvenir un objet qui manque à sa collection.

Le film « Là où naissent les ruines » traite de la mémoire qui forme l’identité et, comme dans les autres productions d’ « Iterative Memories of Cantor Dust Man », c’est un film très musical dont j’incarne le protagoniste.

On peut donc y voir un épisode alternatif de la série. Il s’agirait d’une vie de Romanesco, parallèle à la comédie musicale « Cantor Dust Man » et « Puzzle 3D ». Romanesco a de multiples lignes de vies et le temps n’est pas si linéaire.

 

MG : Toutefois, cette série ne comporte pas que des films : elle est née d’un dessin et elle en génère d’autres, ainsi que de la musique. Toutes ces itérations se font écho et se nourrissent conceptuellement.

 

SL : Tout à fait. Par exemple, j’ai réalisé l’installation de dessins « No Place Like Home » en écho au film « Là où naissent les ruines ».

Elle est composée de deux grands dessins au feutre et à la pierre noire, suspendus dos à dos. D’un côté le profil droit d’un visage, de l’autre, le gauche. Tel une cage, ce visage très géométrique est composé uniquement d’arrêtes aux couleurs de la peau et des cheveux. À l’intérieur de cette « tête cage » se trouve un prisonnier miniature. Pour dessiner ces profils de la « tête cage », j’ai d’abord scanné en trois dimensions ma tête, aplati ce volume en 2D pour le faire dessiner en grand, au crayon, par un ploter (une machine à dessiner de l’artiste Nicolas Guillemin) et j’ai finalement repassé cette esquisse aux feutres de couleurs. Enfin, j’y ai emprisonné le petit personnage, que j’ai dessiné à main levée à la pierre noire.

 

Cette liberté de passer d’un médium à l’autre est le fondement du cinéma et de la vidéo : une somme de médias qui ne font plus qu’un. Exactement comme de se dire, à l’inverse, qu’un artiste est une personne qui se multiplie. J’adore l’idée d’art total mais aussi le principe transmédia d’un univers étendu par-delà les supports.

 

MG : « Là où naissent les ruines » met en scène un condamné à mort à qui l’on accorde selon une ultime compassion en quelque sorte une dernière cigarette. D’où vient tout à coup la dimension tragique de ce nouveau projet ?

 

SL : Jusqu’ici, mon travail a toujours pris naissance dans la mélancolie et l’angoisse. Dans mes films, ce sont les conflits internes des personnages qui jaillissent à l’image.

 

Mon intérêt pour le sujet de la privation de liberté est né assez tôt. Mes origines iraniennes m’ont sensibilité particulièrement à ce propos. En Iran, mon grand père est mort en prison. Mon père et moi ne pouvons pas aller dans mon pays d’origine au risque d’y être enfermés pour “espionnage”; ou d’autres raisons arbitraires.

 

En 2013 était rendu public le témoignage de Monique Mabelly sur la dernière exécution en France, en 1977. Dans ce document, la magistrate décrit les ultimes minutes, la situation obscène de ce spectacle, avec une empathie irrésistible. Le condamné fume sa dernière cigarette et il sait qu’à la dernière bouffée, il sera précipité dans la cour des Beaumettes et, comme disait Badinter, il sera « coupé en deux ».

 

J’ai été bouleversé par ce texte et je m’étais juré de l’adapter. Mais je ne me sentais pas prêt.

 

Dix ans plus tard, j’expose au Castelet de Toulouse et le projet semble sur mesure car avant d’être un lieu d’exposition, le Castelet appartient au patrimoine, mais pas le plus heureux : c’est une ancienne prison. J’ai donc d’abord écrit quelques versions de scénarios adaptant les dernières minutes du dernier guillotiné de France, Hamida Djandoubi. Peu satisfait d’une adaptation littérale, j’ai passé un an à faire des recherches, me documenter sur la peine de mort et le quotidien des détenus en France, aux Etats-Unis, en Iran...

J’ai ainsi, dans la foulée, écrit le scénario d’un autre projet de film sur le sujet : « Des nuages dans un bocal ».

 

Contraint par le temps et l’argent, j’ai voulu formuler une expression simple et épurée, ce qui a donné le film Là où naissent les ruines.

 

J’ai cherché ce que j’avais en commun avec un prisonnier ; pour aller plus loin, ce que nous, les gens de l’extérieur, les « innocents », avons en commun avec un condamné à mort. Il y a d’abord l’intériorité qui s’oppose à l’extérieur, hors des murs, mais aussi qui s’oppose à la persona, notre surface.

Surtout, j’ai ressenti viscéralement le vertige face à la disparition. Nous nous divertissons pour ne pas y penser, mais évidemment elle est imminente, elle nous concerne tous et toutes. Je me suis alors projeté dans cette situation.

 

MG : Le tintement implacable de l’horloge, il est 4h, la consumation de la cigarette, scandent la durée du film, matérialisent le compte à rebours. Cette fois le corps est contraint après avoir été dans vos précédents films scindé, multiplié à l’infini « fractalisé », traversé. Puis le film bascule dans une autre dimension. On entend : « Qu’est ce que tu feras quand tu sortiras ? ». Noir. Gros plan du condamné. Blanc. Face à cette impossibilité, la liberté et la vie des pensées intérieures luttent-elles contre la mort imminente ? Comment avez vous conçu organisé ces scènes suivantes ?

 

SL : Le film est structuré en épanadiplose, c’est-à-dire qu’il se boucle sur lui-même, il finit sur le même plan vide de la chaise et l’horloge, comme une remise à zéro du compteur. À la fin du film, la place est libre pour le prochain.

Il commence par une entrée de champs, exactement comme au théâtre. Ceci fait référence aux dernières minutes des condamnés à mort aux Etats-Unis. Encore aujourd’hui, une séance américaine a lieu en journée pour permettre aux visiteurs d’y assister. Ainsi peuvent venir la famille du condamné et celle de la victime. En France, des années 1940 (fin des exécutions sur la place publique) à 1977, cela avait lieu face à une dizaine de professionnels du monde carcéral, de la justice, du personnel religieux… Bref, face à des spectateurs, mais avant le lever du soleil, comme une chose honteuse que l’on cachait dans les coulisses de la justice, entre gens du métier.  

 

En France toujours, durant ses dernières minutes, le condamné avait les mains liées et on l’asseyait sur une chaise devant son public.  Puis venait le rituel de la cigarette et, spécialité française, le verre de rhum. 

Dans mon film, les mains des surveillants, qui semblent maintenir (ou soutenir) le condamné, évoquent une situation durant les exécutions américaines. Il arrive ainsi que des surveillants contiennent le condamné pendant que d’autres le sanglent sur son lit d’exécution.

 

En somme, mon film mixe les références françaises à celles des Etats-Unis pour toucher à une forme plus allégorique. Le mélange, l’hybridité, l’impureté font parti de mon travail. Les inspirations américaines viennent du fait qu’une partie de ma famille vit là bas, j’y ai étudié et je trouve la culture française encore fortement sous influence américaine.

Au bout du compte, nous ne savons pas à quelle époque le film se situe et nous ne connaissons pas l’objet de la condamnation. Ce qui demeure, c’est l’humain.

 

À partir du moment où il fume, le condamné part dans ses pensées. La réminiscence d’une voix féminine (« Qu’est-ce que tu feras quand tu sortiras ? »), enclenche le flot. Ses pensées représentent-elles une réponse littérale, que ferait-il s’il pouvait sortir ? Sont-elles des souvenirs ? Peu importe. Tout imaginaire n’est qu’une adaptation mémorielle, projection vers devant en prenant appui sur avant.

Mais surtout, ce qui est extérieur à la prison est devenu pour lui une virtualité : avant, pendant et après.

 

MG : Justement j’aimerais vous lire sur l’adéquation des pensées intérieures avec les images virtuelles. Comment ont-elles été façonnées. Cette impression que l’on a de flotter entre souvenirs ou rêves. Vous pourriez aussi aborder la relation avec la musique, que l’on n’a pas encore évoquée.

 

SL : Pour les images mentales du film, j’ai voulu des lieux et personnes évoquant des aspects importants d’une vie qui pourraient manquer au détenu. Être en extérieur, dans la nature ou en ville ; l’amour, les amis, la famille…

Pour cela, j’ai capturé des scans 3D. J’ai choisi un rendu 3D en « fils de fer », ce qui peut évoquer une cage bien sûr, mais aussi une toile tissée par la mémoire.

Je tenais aussi à ce que les couleurs demeurent sur ces arrêtes, pour qu’on ressente toujours une immersion dans un espace qui a existé.

 

J’ai gardé les imperfections de ces captations 3D. Mon but est de jouer sur l’ambiguïté de ces espaces virtuels. Dans leur fabrication, ils sont des empreintes inachevées de la réalité. Pourtant, dans le contexte du film, ils sont aussi des ruines. Par exemple, il y a un espace intérieur où l’on peut entendre du vent qui s’engouffre par les « trous » dans les murs. Ces trous sont des artefacts du scan 3D. Des arbres en extérieur, il ne reste souvent que des troncs. La chambre finit par disparaitre, se désintègre et s’éloigne de nous dans le néant.

 

Concernant la musique de mes films, ce sont les émotions qui guident ma composition. La mélodie prime, le rythme suit. Elle a une part importante dans la série « Iterative Memories of Cantor Dust Man ». C’est flagrant dans la « comédie musicale » pour soliste, Cantor Dust Man.

 

J’ai l’impression que notre rapport à la mélodie est d’abord culturel. Pour ma part, j’ai été formé au classique, puis j’ai joué de la batterie dans des groupes de rock, chanté dans d’autres et finalement j’ai mené mon projet musical solo. Depuis mon film « Puzzle », je produis mes musiques de film en improvisant sur un instrument (piano, guitare…) face à l’image. Ensuite je fixe l’improvisation en la rejouant, parfois à l’identique. Enfin, j’arrange si j’en ressens le besoin, j’ajoute d’autres instruments… Je suis donc d’abord spectateur de mon montage et j’exprime cet état par la musique.

En général, la musique m’aide à traduire les sensations du personnage. Souvent il est d’ailleurs personnifié par un instrument. Dans Cantor Dust Man, c’est le piano et sa richesse chromatique qui fait écho aux multiples visages (c’est un instrument orchestre en soit, ce n’est pas pour rien qu’il est la base de beaucoup de compositeurs).

 

Dans Là où naissent les ruines, la guitare est l’instrument que je trouvais à l’échelle du prisonnier. Ici, globalement la musique flotte, elle est en suspension, comme la vie du condamné durant cet instant.  Dans un principe d’épure, j’ai préféré qu’elle soit éthérée, pleine de réverbération. Une note fait écho à l’autre, à l’octave par exemple, créant une sensation d’équilibre… Cela produit un paradoxe. Nous savons être face à un drame. Pourtant, beaucoup de condamnés à mort se sont préparés à la mort et partent sereins.

Et malgré cela, des arpèges obsessionnels tournent sur eux même comme une vis qui approfondit là où peut-être, on préférerait rester en surface.

Une ritournelle qui rappelle à la réalité.

 

Février 2024

Là où naissent les ruines, 2023, 9 min.

Interview with Mo Gourmelon

 Mo Gourmelon: On the occasion of the development of your new project “There where the ruins are born” (2023, city of Toulouse, Cantor Dust Lab), you told me you wanted to develop a series which extends the history and the universe of “Cantor Dust Man” (2009 Le Fresnoy) and the following “3D Puzzle” (2010 with Géode). You continued by saying that like these two films you would like to keep the experimental, hybrid form, the freedom that you had for these projects guided by plastic and conceptual ideas. First of all, where does this name Cantor Dust come from, which is rather pretty and poetic and which we feel “made”. Can you introduce us to this set that you called “Iterative Memories of Cantor Dust Man”? How does “There where the ruins are born” embody a sequel?

 

Sébastien Loghman: The title of the series “Iterative Memories of Cantor Dust Man” comes from “Cantor dust” which means, in English, “Cantor dust”. This mathematical set was "made", to use your expression, by the 19th century scientist Georg Cantor. This is the first example of a fractal in the history of mathematics. To put it in perspective, fractals were already in nature before appearing in math. For example, take the romanesco cabbage that appears in my film Cantor Dust Man: if you look at a detail of this vegetable, that detail resembles cabbage as a whole. Thus, we find the same structure at different scales. And this is also true for the mountains, the snowflakes and the coasts of Brittany.

 

The idea of “Cantor Dust Man” was to depict the plurality of a being. The character Romanesco describes having lived several lives, and sings that a memory contains a memory which contains a memory, etc... The 3D Puzzle relief film is a sequel: the character Romanesco has aged and is looking in a memory for an object which missing from his collection. The film “Where the Ruins Are Born” deals with the memory that forms identity and, as in the other productions of “Iterative Memories of Cantor Dust Man”, it is a very musical film in which I play the protagonist. We can therefore see it as an alternative episode of the series. It would be a life of Romanesco, parallel to the musical “Cantor Dust Man” and “3D Puzzle”. Romanesco has multiple lifelines and time is not so linear.

 

MG: However, this series does not only include films: it was born from a drawing and it generates others, as well as music. All these iterations echo and nourish each other conceptually.

 

SL: Absolutely. For example, I created the installation of drawings “No Place Like Home” echoing the film “Where the ruins are born”. It is composed of two large drawings in felt-tip pen and black stone, suspended back to back. On one side the right profile of a face, on the other, the left. Like a cage, this very geometric face is composed solely of edges in the colors of the skin and hair. Inside this “head cage” is a miniature prisoner. To draw these profiles of the “cage head”, I first scanned my head in three dimensions, flattened this volume in 2D to have it drawn in large size, in pencil, by a plotter (a drawing machine of the artist Nicolas Guillemin) and I finally went over this sketch with colored markers. Finally, I imprisoned the little character there, which I drew freehand with black chalk. This freedom to move from one medium to another is the foundation of cinema and video: a sum of media that become one. Exactly like saying, conversely, that an artist is a person who multiplies. I love the idea of total art but also the transmedia principle of a universe extended beyond the media.

 

MG: “Where the ruins are born” features a death row inmate who is granted, as a matter of ultimate compassion, one last cigarette. Where does the tragic dimension of this new project suddenly come from?

 

SL: Until now, my work has always been born out of melancholy and anguish. In my films, it is the internal conflicts of the characters that emerge on the image. My interest in the subject of deprivation of liberty was born quite early. My Iranian origins make me particularly sensitive to this subject. In Iran, my grandfather died in prison. My father and I cannot go to my country of origin at the risk of being locked up there for “espionage”; or other arbitrary reasons. In 2013, Monique Mabelly's testimony on the last execution in France, in 1977, was made public. In this document, the magistrate describes the final minutes, the obscene situation of this spectacle, with irresistible empathy. The condemned smokes his last cigarette and he knows that with the last puff, he will be thrown into the Beaumettes courtyard and, as Badinter said, he will be “cut in two”.

 

I was overwhelmed by this text and I vowed to adapt it. But I didn't feel ready. Ten years later, I exhibited at the Castelet in Toulouse and the project seemed tailor-made because before being an exhibition space, the Castelet belonged to heritage, but not the happiest: it was a former prison. So I first wrote a few versions of screenplays adapting the last minutes of the last guillotine in France, Hamida Djandoubi. Not satisfied with a literal adaptation, I spent a year researching, documenting myself on the death penalty and the daily lives of prisoners in France, the United States, Iran... So, at the same time, I wrote the script for another film project on the subject: “Clouds in a Jar”. Constrained by time and money, I wanted to formulate a simple and refined expression, which resulted in the film Where are the ruins born. I looked for what I had in common with a prisoner; to go further, what we, the people on the outside, the “innocents”, have in common with a condemned man. First there is the interiority which is opposed to the exterior, outside the walls, but also which is opposed to the persona, our surface. Above all, I viscerally felt dizzy in the face of disappearance. We entertain ourselves so as not to think about it, but obviously it is imminent, it concerns us all. I then projected myself into this situation.

 

MG: The relentless ringing of the clock, it’s 4 o’clock, the smoking of the cigarette, punctuate the duration of the film, materializing the countdown. This time the body is constrained after having been in your previous films split, multiplied to infinity “fractalized”, crossed. Then the film shifts into another dimension. We hear: “What will you do when you get out? ". Black. Close-up of the condemned man. White. Faced with this impossibility, do freedom and the life of inner thoughts fight against imminent death? How did you design and organize these following scenes?

 

SL: The film is structured in epanadiplosis, that is to say it loops on itself, it ends on the same empty shot of the chair and the clock, like a reset of the counter. At the end of the film, the place is free for the next one. It begins with an entrance to the fields, exactly like in the theater. This refers to the last minutes of those on death row in the United States. Even today, an American session takes place during the day to allow visitors to attend. So the family of the condemned and that of the victim can come. In France, from the 1940s (end of executions in public squares) to 1977, this took place in front of around ten professionals from the prison world, justice, religious personnel... In short, in front of spectators, but before rising of the sun, like a shameful thing that was hidden behind the scenes of justice, among professional people.

 

Still in France, during his last minutes, the condemned man's hands were tied and he was seated on a chair in front of his audience. Then came the ritual of smoking and, a French specialty, a glass of rum. In my film, the hands of the guards, which seem to hold (or support) the condemned, evoke a situation during American executions. It thus happens that guards contain the condemned while others strap him to his execution bed. In short, my film mixes French references with those of the United States to achieve a more allegorical form. Mixture, hybridity, impurity are part of my work. The American inspirations come from the fact that part of my family lives there, I studied there and I find French culture still strongly under American influence. Ultimately, we don't know what era the film is set in and we don't know the purpose of the condemnation. What remains is the human.

 

From the moment he smokes, the condemned person goes into his thoughts. The reminiscence of a female voice (“What will you do when you go out?”) sets off the flow. Are his thoughts a literal answer, what would he do if he could get out? Are they memories? Never mind. All imagination is only a memory adaptation, projection towards the front while relying on the front. But above all, what is outside the prison has become a virtuality for him: before, during and after.

 

MG: I would actually like to read you on the adequacy of interior thoughts with virtual images. How were they shaped? This feeling we have of floating between memories or dreams. You could also approach the relationship with music, which we have not yet mentioned.

 

SL: For the mental images of the film, I wanted places and people evoking important aspects of a life that the inmate might miss. Being outdoors, in nature or in the city; love, friends, family… For this, I captured 3D scans. I chose a 3D rendering in “wire”, which can evoke a cage of course, but also a web woven by memory. I also wanted the colors to remain on these edges, so that we always feel an immersion in a space that existed. I kept the imperfections of these 3D captures. My goal is to play on the ambiguity of these virtual spaces. In their making, they are unfinished imprints of reality. Yet, in the context of the film, they are also ruins. For example, there is an interior space where you can hear wind rushing through the “holes” in the walls. These holes are artifacts from the 3D scan. Of the trees outdoors, only trunks often remain. The room ends up disappearing, disintegrating and moving away from us into nothingness.

 

Concerning the music of my films, it is the emotions that guide my composition. The melody takes precedence, the rhythm follows. She has an important part in the series “Iterative Memories of Cantor Dust Man”. This is evident in the “musical” for soloist, Cantor Dust Man.

 

I have the impression that our relationship to melody is first and foremost cultural. For my part, I was trained in classical music, then I played drums in rock groups, sang in others and finally I carried out my solo musical project. Since my film “Puzzle”, I have produced my film scores by improvising on an instrument (piano, guitar, etc.) in front of the image. Then I fix the improvisation by replaying it, sometimes identically. Finally, I arrange if I feel the need, I add other instruments... I am therefore first of all a spectator of my montage and I express this state through music. In general, music helps me translate the character's feelings. Often it is also personified by an instrument. In Cantor Dust Man, it is the piano and its chromatic richness which echoes the multiple faces (it is an orchestral instrument in itself, it is not for nothing that it is the basis of many composers).

 

In Where the Ruins Are Born, the guitar is the instrument that I found on the scale of the prisoner. Here, overall the music floats, it is in suspension, like the life of the condemned during this moment. In a principle of purity, I preferred it to be ethereal, full of reverberation. One note echoes the other, at the octave for example, creating a sensation of balance... This produces a paradox. We know we are facing a tragedy. However, many people sentenced to death have prepared for death and leave peacefully. And despite this, obsessive arpeggios turn on themselves like a screw that deepens where perhaps we would prefer to stay on the surface. A refrain that reminds us of reality.

February 2024

bottom of page