EREWHON #2
Une série de
Pierre Cassou-Noguès, Stéphane Degoutin et Gwenola Wagon
Bienvenue à Erewhon
Erewhon émerge à partir d’images qui circulent sur Internet. C’est une fable sur la vie des humains dans un monde où l’automatisation a été fantasmée jusqu’à ses extrêmes. Les Erewhoniens sont débarrassés des tâches pénibles et s’adonnent à des occupations ludiques. Des robots-phoques prennent soin des personnes âgées et ronronnent selon un logiciel d’intelligence artificielle. Des cochons voient leur cerveau mis en réseau et augmenté. Des algorithmes redonnent voix aux morts.
Les onze chapitres, chacun accompagné d’un texte, s’assemblent en un film de 52 minutes. Ils sont visibles sur la plateforme « Bienvenue à Erewhon ».
Comme le récit de Samuel Butler, « Bienvenue à Erewhon » dresse le portrait d’une ville située dans un présent parallèle. L’automatisation a été poussée jusqu’à ses limites extrêmes. Le travail tel qu’on le connaît a disparu.
Production
Lissandra Haulica, Irrévérence films
Co-production
Dispositif pour la création multimédia, CNC - Dicréam
Jeu de Paume espace virtuel
Avec le soutien de
Artec, Agence Nationale de la Recherche
Laboratoire TEAMeD, Université Paris 8
Chapitre 7 : Animal amour, 2019, 3 min 37
Je constatais avec bonheur que certains Erewhoniens avaient décidé de se rapprocher des animaux et de partager avec eux des moments de complicité.
J’observais partout d’étonnantes scènes de liesse entre les espèces les plus diverses. Il me semblait que les différenciations communément admises autrefois entre animaux, plantes et humains avaient cessé d’exister. Ou, du moins, que ces derniers mettaient en pratique tout ce qui leur était possible pour se rapprocher des animaux et des plantes.
Chapitre 8 : Spa total, 2019, 3 min 38
Partant des bribes des textes de Samuel Butler, les machines ont reconstitué sa voix et l’ont laissé errer dans les images qui circulent dans leurs cerveaux. Cette voix nous a entraînés dans la ville où les machines ont pris leur autonomie : elles nous ont montré l’organisation de la production, l’évolution des machines, les jeux des humains dans les bureaux, les rues sous le regard des caméras de bienveillance, la vie domestique dans les maisons, les vieux enfermés avec leurs robots, la relation des humains aux animaux et aux plantes, les moments de détente dans les spas…
Chapitre 9 : Humains Plantes, 2019, 4 min 30
Un jour, j’en ai eu marre des bureaux et des gens. Je me suis installé dans un pavillon, en banlieue d’Erewhon. J’ai commencé à cultiver mon jardin. Allongé sur le sol, le menton planté dans la terre, je regardais les machines travailler et les herbes pousser. C’était reposant.
Puis les plantes ont grandi ; elles ont donné des fruits, que les machines cueillaient, et que moi je mangeais. Les machines s’occupaient de moi, comme elles s'occupaient des plantes. J’ai réfléchi : l’homme est une plante.
Chapitre 10 : Bienvenue dans un rêve d'ingénieur, 2019, 5 min 10
Les ingénieurs rêvent d’immenses bâtiments génériques, contenant tous les produits possibles, en attente d’être commandés et livrés à domicile dans une fluidité parfaite, aussi facilement que l’on envoie une requête sur un moteur de recherche.
Ils rêvent d’entrepôts automatisés organisés autour d’étagères géantes, formant des quadrillages métalliques s’étendant dans toutes les directions d’un espace homogène et indifférent –, où la variété infinie du monde se réduit à des coordonnées euclidiennes.
Chapitre 11 : Epilogue, 2019, 6 min 19
J’aurais tellement aimé vivre en Erewhon. J’aurais plongé dans les tuyaux colorés, gravitant d’un endroit à l’autre de la ville, aspiré par la vitesse et les circonvolutions des courbures des toboggans. J’aurais visité les anciens bureaux reconvertis en aires de jeux. On y fait des courses de chaises roulantes en open space, des concours d’agrafeuse, des compétitions de lancer d’avion en papier les yeux bandés et la journée finit en strip-tease dans un centre d’appel désaffecté.